mardi 16 décembre 2008

Sara: choses que je voudrais faire avant de mourir

Les choses que je voudrais faire avant de mourir.

Je voudrais aller en Amérique du Sud.
Lire Proust e Calvino.
Vivre aux Etats-Unis.
Ecrire un roman.
Connaître Rome comme il faut.
Apprendre l’hébreu.
Inventer un tarte.
Manger “Chex Maxime!. Je ne sais pas si ça existe encore ni où c’est exactement (Paris?) mais ça sonne vraiment bien.
Faire le tour du monde avec mon avion privé.
Breveter quelque chose, ça serait mieux si elle est assez inutile.
Bavarder avec mon arrière grande-mère, après que quelqu’un a inventé une machine à remonter le temps.
Suivre le soleil pendant une année et oublier le froid.
Voir mes enfants qui jouent avec mes neveux.
Faire de la politique active.
Manger des escargots pour savoir s’ils sont vraiment dégoûtants.
Apprendre à bien chanter.
Vivre pendant quelques mois avec une tribu africaine.
Ne pas arrêter d’écrire cette liste.

Sara: Mes villes

Mes villes
Paris, la première ville dont je suis tombée amoureuse. J’avais quinze ans et je me promenais dans le Rue de la Roquette avec mon premier amour. La perfection, c’était Montmartre.
Barcelone, où j’ai bu et j’ai dansé et j’ai essayé de parler catalan.
Grenoble, ses montagnes et l’air gelé le matin, rêver en français et découvrir qu’il y a beaucoup plus que mon petit monde.
Amsterdam, Turin, Nice, Naples, etc. les villes par lesquelles je suis passée.
Séville, où j’ai beaucoup mangé.
Madrid, qui m’a vue travailler pour la première fois. Madrid, sans mer, qui m’est entrée en silence dans le coeur.
Jérusalem, le jus de pamplemousse.
New York, quand j’irai pour la première fois.
Berlin, que je voyais à travers des larmes à cause d’un amour malheureux.
Tunis, la famille.
Les villes moches, dont je ne veux pas parler.
La villes des villes, la plus belle des villes qui existent et qu’on peut // puisse imaginer, dont je déteste les défauts, dont j’aime les défauts, où on peut pleurer pour autant de beauté qui nous entoure, où on peut se promener le long de son fleuve, bras dessus bras dessous avec l’eternité...
est-ce que j’ai besoin de la nommer?

Isabel: Moderato Cantabile

MODERATO CANTABILE

Le vieux salon était un peu poussiéreux et conservait encore les restes d´un décor victorien : des pots avec des fleurs en tissu, des napperons au crochet sur les bras des fauteuils ainsi que d´autres détails modernes il y a deux siècles.
Un chat tigré, n’accordant le moindre intérêt à son entourage, faisait semblant de dormir sur une couverture à carreaux écossais.
-Veux-tu lire ce qu´il y a d’écrit au dessus de la partition ?-demanda la dame d´un ton fâché sans qu’on sache pourquoi, tout en posant sur l´enfant son regard en acier à travers ses petites lunettes.
-Moderato Cantabile, dit l´enfant blond comme un petit ange habillé en habit de matelot.
La dame ponctua cette réponse d´un coup de crayon sur le clavier. L´enfant resta immobile, la tête tournée vers la partition aux bords abîmés et jaunissants, pleine de petites mouches noires sautant sur des lignes à étendre le linge qu´il ne comprenait pas du tout et qui l´énervaient plus qu´il ne le voulait.
-Et qu´est-ce que ça veut dire Moderato Cantabile ? Ou comme toujours, tu ne sais rien de ce que l´on te demande ? Le chat a mangé ta langue, peut-être ?
-Je ne sais pas, répondit l´enfant d´une petite voix effrayée.
Une femme, assise à trois mètres de là, soupira. Le soupir qui s´envola vers les ornements du plafond fut pendant un bref instant la seule chose vivante dans la pièce et eut la chance de faire ouvrir un oeil espion au chat dormant.
-Tu es sûr de ne pas savoir ce que ça veut dire, Moderato Cantabile ? Reprit la dame, cette fois d´un air compréhensif qui sonnait faux.
En tout cas, l ´enfant ne répondit pas, et baissant le regard, commença à donner de petits coups de pied au piano.
La dame poussa un cri d´impuissance étouffé, tout en frappant de nouveau le clavier de son crayon. Pas un cil de l´enfant ne bougea, même s´il commençait à sentir une très grande envie d´aller faire pipi et aurait échangé son sac plein de billes pour se trouver à la place du chat.
- C´est toujours comme ça… je ne sais jamais ce que je dois faire avec lui- chuchota la mère d´un air plaintif.

Isabel: Le voleur

LE VOLEUR
1er Chapitre

Tandis que le voleur, blotti dans sa cape de grosse laine, attendait que la lumière du balcon s´éteigne, la neige commença à tomber.
Il avait froid et soif d´un petit verre de ce bon cognac français. Il regretta le grand feu qu´il avait vu dans le salon une heure avant, quand le bal masqué battait son plein et qu´il n´avait attiré l´attention de personne. De toute façon il n´avait jamais perdu de vue le collier en diamants avec une grosse perle en forme de poire pendu sur le col de la marquise. Il avait même réussi à danser une pavane avec elle en regardant le décolleté blanc de la femme dont la peau avait, il le savait fort bien, le toucher de la soie indienne.
Pendant un instant, il avait eu envie de poser sa main dans les dentelles si proches et oublier le reste, mais il était redevenu un professionnel et savait qu´il ne fallait pas commettre d’ erreurs dangereuses, car le tumulte qui aurait suivi serait complètement contraire à ses plans bien tracés.
Bon, une fois le collier dans ses mains, il aurait à sa disposition des tas de femmes comme celle-ci, et même plus jeunes et plus belles, bien que moins riches.
Le voleur, dont personne ne connaissait le nom, était l´ancien chevalier de la Belle-Loire, Jean Damien Baptiste Dupontier, et avait une récompense en argent sur sa tête, ainsi que la liste la plus longues de lits inconnus où il avait dormi.
-Une belle chance que la tienne, Jean Damien, il faut la conserver- murmura- t-il pour soi même en poussant les doigts de ses gants déjà bien serrés- mais qu´est-ce que l´on peut faire quand on t´a dépouillé de tout ? Se venger et rien d´autre.
Le voleur regarda le balcon une fois de plus, mais la lumière des chandeliers filtrait encore entre les rideaux ouverts. Il regarda Voltaire, son fidèle cheval noir qui attendait caché, comme lui, sans faire un seul bruit, même si chaque fois qu´il respirait, de gros nuages de fumée s´échappaient de ses naseaux.
-Bravo pour toi aussi- pensa Jean Damien.
Le cheval sembla avoir compris ses pensées, car il balança la tête, acceptant le compliment silencieux de son maître. L´avantage d´être noir, c´est que l´on peut passer inaperçu dans la nuit, mais la neige commença tomber.
-Parbleu, un petit inconvénient… et cette petite et sotte servante qui ne donne aucun signe de vie.
Le voleur, grand avec de longs cheveux bruns qu´il portait jusqu’ aux épaules et des yeux bleus clairs, héritage de sa mère irlandaise, savait trop bien que son apparence, même après les années écoulées et alors qu´il n´était plus le jeune libertin et capricieux qu´il était à 20 ans, lui donnait certains avantages parmi les femmes de toute condition. Maintenant, il était plus sage et moins audacieux, mais son corps restait en forme grâce à la nouvelle vie qu´il avait choisi dans sa lointaine et sauvage propriété en Irlande. On aurait dit un moine, comme ceux qui l´avaient aidé à s´échapper autrefois. Il s’occupait de ses affaires sans oublier de nager, de monter à cheval et de s’entraîner à l’épée.
Bon, la lumière venait de s´éteindre et la bougie de la servante apparut près de la fenêtre de la cuisine.
-C´est l´heure.
Laissant tomber la cape qui aurait gêné sa liberté de mouvements, il lança un baiser en direction de la petite sotte qui, peut-être, désirait une récompense supplémentaire à celle qu´elle avait déjà reçue. Il s´achemina vers le palais et commença à grimper comme un chat sur la surface rugueuse et mouillée, un chemin qu´il avait étudié auparavant. Une fois son but atteint, il poussa la porte du balcon. Bien, jusqu´ici tout marchait comme prévu, et il se glissa à l´intérieur. L´odeur de son parfum lui sauta au nez : doux et dense comme toujours, ses sens aussi étaient en forme. Lorsque ses yeux se furent habitués à l´obscurité, il avança vers la commode et en palpa la surface. Le voilà.
-Maintenant tu es à moi, comme tu aurais toujours dû l´être.
Mais soudain la lumière s´alluma.
« Idiot. Tes sens ne sont plus les mêmes qu´avant. Tu aurais dû te rendre compte par sa respiration que la dame n´était pas endormie du tout. »
-Te voilà une fois de plus dans ma chambre, Damien- chuchota la femme en chemise de nuit - peut être pensais- tu que je ne t´avais pas reconnu ? Il y a des choses qu´on n’oublie pas… Ton déguisement était très bon mais quoi ! Tu es encore le plus beau des hommes, même plus qu´avant, dirais-je. L´âge te fait du bien.
-Bonne nuit, ma chère- salua le voleur en souriant.
-Et c’est pareil aussi pour ton sourire, infâme proscrit malhonnête. Si tu rôdait près d´ici, je savais bien ce que tu cherchais et ce n´est pas moi.
-Tu es une jolie pièce de joaillerie, ma belle ; mais oui, cette fois j´en cherche une autre.
-Mon Dieu, Damien !- la femme se leva du lit et mit, sur sa chemise de nuit, une robe de chambre qu´elle ne ferma pas du tout.- C´est dommage car je donnerais volontiers quelque chose pour une de tes bousculades.
-Une autre fois, peut-être chérie. Cette fois-ci, j´ai du travail !
La femme s´avança vers lui et, jetant ses bras autour du cou de l´homme, lui donna un baiser passionné. Il avait encore le collier dans sa main gantée.
-Prends –le si tu veux. Un cadeau de ma part puisque j´en ai des tas. Le faire sortir du pays sera ton problème.
-C´était le bijou préféré de ma mère et tu le sais fort bien- constata-t-il en la serrant contre lui.- Si te veux un conseil, tu ferais mieux de faire tes bagages et de partir pour l´Angleterre. D´ici peu, aucun de tes bijoux ne te rendra service… et encore moins ne sauvera ton cou d´aristocrate, même si tu n´en as jamais été une.
-Merci pour tes conseils, mais je n´ai rien à faire en Angleterre.
-Je te l´aurais dit…
-Au moins pas avant que tu me rendes un petit service. Ce n´est pas gratuit, ah non. Tu devras faire quelque chose pour moi si te veux ton collier.
-Tu dois savoir que je ne suis plus l´homme que j´étais.
-Ah, ça, je n’en crois rien- s´écria la dame en se frottant contre lui.- je suis sûre que tu te souviens encore des choses que tu as apprises dans cette maison de Calais.
L´homme l´a pris avec force par les poignets.
-Tu veux dire quelque chose comme ça…
D´une secousse, il enleva le ceinturon de la robe de chambre et en lia les poignets de la dame. Puis il tira le petit poignard qu´il portait toujours sur lui et en menaça sa gorge blanche et parfumée.
-Maintenant, qu´est-ce que tu veux que je fasse pour toi, ma belle ?- demanda-t-il après.
Le sourire de Damien avait perdu une bonne partie de son charme.
-Je veux que tu tues mon mari.
-Ah oui, bien sûr, mais je crois que ça peut attendre…
D´une poussée, il plaça la dame contre le mur et d´un coup très adroit coupa sa chemise de nuit avec le poignard. Elle étouffa un cri.


Aïcha: je crois que

Je crois que c’est difficile de renaître tous les sept ans. Je crois à l’amour, l’amitié, la beauté, l’absence, l’austérité, le silence. Je crois que le temps est un compagnon infidèle. Je crois à la vraie solitude. Je ne crois pas au luxe. Je crois à la différence des langues, des cultures. Je ne crois pas aux vraies civilisations. Je ne crois pas à la supériorité. J’aime l’odeur de la menthe, la chaleur de printemps, la nuit, la poésie, le calme. Je crois à la joie, je crois à la tristesse. Je crois au délire, je crois à la folie. Je n’aime pas le bruit, les conversations longues, les fêtes continues, téléphoner, donner une conférence. Je crois à la nature. Je crois à la bohème. Je crois à l’amour absolu. Je crois au Greco. Je crois à la dignité des gens. Je crois à la beauté absolue des beaux-arts. Je crois à la spiritualité, à l’austérité. J’aime le calme des monastères, des synagogues, des mosquées. J’aime les rites. Je crois à la liberté. Je crois à la souffrance. Je n’aime pas l’occupation. Je crois aux enfants. Je crois à l’espoir. Je crois fortement à la vie, je suis accrochée à la vie. J’aime penser à la mort. J’aime lire sans cesse. Je crois au monologue même si je suis accompagnée. Je crois à ma petite Sara. Je crois à la distance. Je crois à la nostalgie. J’aime l’hiver. J’aime la cannelle, la couleur de la cannelle et le bleu de mon enfance.


La musique pour moi est un souvenir. Une proche terre lointaine. Une amitié oubliée. La distance. Ça fait un an que je me rends compte que je n’écoute plus de musique et je sais pourquoi.

La musique peut remplir ou casser le silence.
La musique nourrit l’âme (Proverbe arabe).
 
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